Histoire

mai 13, 2020

Des villes résilientes après la COVID-19 : réécriture des politiques

By Evergreen

Quelles politiques, quels investissements et quels programmes devraient être maintenus après la pandémie?

La COVID-19 a poussé les gouvernements de tous les échelons à agir plus vite que jamais. La gravité immédiate et palpable de la situation a permis aux gouvernements d’obtenir l’accord d’une assez grande partie des citoyens concernant l’utilisation de toutes les stratégies à leur disposition pour contenir la pandémie et limiter les répercussions socio-économiques de l’éloignement social. Il y a eu des interdictions et des suspensions d’expulsion dans tout le pays, une aide salariale et un complément salarial pour les travailleurs essentiels sans précédent de la part du gouvernement fédéral ainsi qu’un investissement dans des maisons modulaires pour héberger les sans-abri. En constatant la rapidité avec laquelle ces solutions ont été mises en œuvre, beaucoup se posent les questions suivantes : pourquoi a-t‑il fallu une pandémie pour que nous puissions utiliser ces outils? Quelles politiques, quels investissements et quels programmes devraient être maintenus après la pandémie?

Evergreen, Villes d’avenir Canada et de nombreuses autres initiatives commencent à explorer ce que la COVID-19 pourrait signifier pour l’avenir des villes canadiennes. Nous espérons que ce travail permettra de découvrir des façons prometteuses de rouvrir nos villes, d’atténuer les répercussions et les risques futurs et de saisir les occasions créées par la crise de bâtir des villes réellement équitables et résilientes.

Dans un premier temps, nous avons communiqué avec les acteurs de l’aménagement urbain et les leaders communautaires du pays pour connaître leur point de vue sur cette question : comment la COVID-19 changera-t‑elle l’avenir des villes?

Mettons-nous au travail…

Beaucoup de prédictions sont faites au sujet de l’avenir des villes après la COVID-19, mais au bout du compte, c’est à nous de définir cet avenir. Redéfinir nos villes signifie que nos communautés devront défendre leurs besoins, que les chercheurs devront comprendre les données, que les politiciens devront soutenir de nouvelles idées audacieuses, que les dirigeants des organisations devront repenser leur prestation de services et que les décideurs politiques devront envisager de nouvelles approches pour régler de vieux problèmes. Jusqu’à présent, nous avons pu reconnaître la gravité des problèmes révélés par la situation de la COVID-19 et nous avons été en mesure de trouver des solutions à court terme pour beaucoup d’entre eux. Notre prochaine priorité est de trouver des solutions durables à très long terme.

Dans le premier article de cette série, nous avons abordé le renforcement des communautés. Dans cet article, nous examinons la réécriture des politiques.

Réécriture des politiques

Réévaluer les politiques qui empêchent nos villes et nos communautés de prospérer; définir une nouvelle vision audacieuse pour nos villes fondée sur une politique globale prometteuse et sur des innovations stratégiques concernant l’intervention en cas de crise.

Mots-clés : équité; espaces verts; les personnes d’abord; accès; conception; changements de comportement; planification.


Nous ne pouvons pas retourner à une vie normale

Niklas Agarwal travaille au carrefour de l’action climatique et de l’urbanisme. Il a collaboré pour la première fois à Evergreen par l’intermédiaire du programme Future City Builders.
Toronto, Ontario

La COVID-19 changera l’avenir de nos villes en nous montrant que nous ne pouvons pas retourner à une vie « normale ». Une vie normale n’a jamais été assez bien. Les gens n’avaient pas les moyens de payer leur loyer, le prix du transport en commun augmentait sans cesse, les jeunes entraient sur un marché du travail instable défini par des emplois de courte durée et des contrats à court terme, les villes du monde entier étaient étouffées par la pollution, des gens devenaient sans-abri pendant que des maisons étaient inoccupées, les travailleurs essentiels étaient sous-payés et surchargés, et les voitures avaient plus d’importance que les espaces publics. Quand je rêve à l’avenir des villes, je vois des villes qui reconnaissent que ces urgences sont continues, qui mettent en œuvre et à l’échelle de façon permanente les politiques créées par la situation et qui donnent la priorité aux besoins de l’ensemble des citoyens. Cette crise nous montre que nos rêves concernant l’avenir des villes sont réalisables. Il suffit que la volonté politique soit présente.

Il ne devrait pas être difficile de profiter des services des villes

Andrew Do est concepteur de service dans la Ville d’Austin.
Austin, Texas (anciennement à Toronto, Ontario)

Imaginez que vous ayez besoin d’aide relativement à votre loyer, mais que vous soyez incapable de produire ou de trouver le talon de paie ou le feuillet d’impôt nécessaire pour prouver que vous y êtes admissible. Pourquoi est‑il si difficile pour les citoyens de profiter des services offerts par nos villes?

Il est vrai que certains services offerts par les villes le sont pour le compte d’autres échelons administratifs, mais ce sont les villes qui embauchent les agents des centres d’appels, les personnes qui gèrent les courriels et celles qui servent les citoyens au comptoir. L’intervention rapide du gouvernement concernant la COVID-19 montre que rien ne justifie qu’il soit difficile de profiter des services et des prestations et que l’examen des ressources soit contraignant pour évaluer l’admissibilité en amont, surtout si les services sont difficiles à offrir en personne. Espérons qu’après la crise de la COVID-19, les villes et les nombreux travailleurs municipaux dévoués, qui voient jour après jour à quel point un examen des ressources contraignant peut décourager les citoyens, seront à l’avant-plan pour faciliter l’accès aux services.

Pas un recul ni un recommencement, mais une réinitialisation

Keren Perla est membre de States of Change et travaille à la mise au point de nouvelles façons de résoudre les défis mondiaux complexes des gouvernements.
Edmonton, Alberta

La pandémie est, avec raison, le sujet central de nos fils de nouvelles, et même de nos espoirs et de nos peurs, mais elle reflète une réalité plus large où les pays et les dirigeants « mènent une guerre » au sujet de crises à la fois distinctes et liées, qui découlent toutes de notre incapacité de vivre de façon durable (Donella Meadows, « Beyond the Limits »). Ce qui distingue la pandémie, c’est qu’elle nous a rassemblés dans une expérience mondiale qui dépasse toutes les frontières. Nous avons un ennemi commun : la pandémie. Cet ennemi est si traumatisant pour nos systèmes humains qu’il a le potentiel de provoquer une réinitialisation.

L’histoire montre que les villes sont l’une des formes d’organisation sociale de l’humanité les plus résistantes et les plus stables. C’est pourquoi il ne faut pas négliger la capacité de nos villes d’évoluer et de se réinventer, et la pandémie de COVID-19 est susceptible d’accélérer les changements qui s’y préparaient depuis longtemps. Ces changements pourraient se produire pour le meilleur ou pour le pire à mesure que les villes sortent de cette parenthèse troublante et incertaine. Compte tenu des scénarios actuels en matière de climat, des inégalités économiques profondément ancrées et de la deuxième vague du virus à l’horizon, je crois que ce ralentissement prolongé créera le besoin et l’occasion de tester de nouveaux modèles économiques qui peuvent contribuer à rendre les sociétés plus résilientes.

J’espère qu’ici, au Canada, la pandémie jettera […] les fondations qui permettront d’aller au-delà du rétablissement. Il faut se poser la question […] de la conception d’un système visant la résilience, et ce sont les gouvernements locaux qui sont en mesure de concevoir et d’amplifier un espace indispensable pour trouver des solutions. La sortie de crise ne sera pas facile, et la plupart des villes ont été poussées à y réagir dans l’immédiat. Il n’en demeure pas moins que la restructuration de la société doit s’appuyer sur une vision.

Ainsi, dès maintenant, alors que les municipalités font face à l’urgence, elles doivent tirer les leçons de cette expérience sur les plans de l’empathie, de nos relations et du bien-être des communautés, et définir de nouveaux modèles opérationnels de citoyenneté à intégrer dans leurs mandats dans le cadre d’une vision à long terme.

Aller au-delà de la réaction, contribuer au rétablissement

Kelli Stevens est membre du personnel de la Fondation Suncor Énergie.
Calgary, Alberta

La crise de la COVID-19 peut rendre possible ce qui semblait impossible à réaliser auparavant. La pandémie montre que nous pouvons changer nos habitudes et nos comportements et que nous pouvons agir collectivement pour le bien commun. Elle démontre aussi que l’action collective nécessite la participation de tous : des dirigeants pour exprimer les besoins, des gouvernements pour établir des politiques répondant à ces besoins, des organisations et des entreprises pour offrir leur capacité d’action, et des particuliers pour procéder à des changements comportementaux. La situation a fait en sorte que de nouveaux héros improbables ont gagné notre respect. Ces personnes avaient habituellement peu de pouvoir et elles sont maintenant essentielles. Une culture de la bienveillance s’est développée dans beaucoup de domaines. Pendant ce temps, la technologie a permis à beaucoup de personnes de rester chez elles en sécurité, de redéfinir notre rapport à l’espace (voyages moins nécessaires pour être en présence de quelqu’un) et de communiquer avec les autres de façon significative (p. ex. les personnes qui ont le privilège de pouvoir continuer à travailler en savent plus sur la vie personnelle et le foyer de leurs collègues). Moins d’avions dans le ciel et moins de voitures sur les routes signifie moins d’émissions de gaz. On remarque aussi le retour de la nature sauvage : des animaux de la faune se promènent dans nos quartiers, ou nous les voyons dans nos sorties accrues à l’extérieur.

Ces changements peuvent‑ils perdurer après la pandémie? Nous l’espérons. Les comportements que nous adoptons, les décisions stratégiques que nous prenons et les structures que nous rebâtissons doivent tenir compte de ces nouvelles possibilités qui s’offrent à nous, sans quoi nous pourrions assister à une importance accrue donnée aux frontières et aux obstacles, à une augmentation du sentiment d’angoisse et de la mentalité de défiance vis-à-vis de l’autre. Bien sûr, malgré tous les aspects positifs, la peur et l’abattement sont aussi présents. On peut le sentir. Il faut tirer des leçons des crises passées et savoir qu’il y aura encore beaucoup à faire après la phase de réaction à l’urgence. Pour qu’après la pandémie, les villes soient plus fortes, le leadership, les politiques, l’exploitation de nos forces et le changement de nos comportements doivent être mis à profit non seulement pour réagir à la crise et nous rétablir, mais aussi pour repenser nos structures et nos mentalités et renforcer notre confiance et notre résilience.

Vous trouvez cette ressource utile ?

Nous avons des centaines d'autres boîtes à outils, vidéos, podcasts et rapports disponibles gratuitement. Il vous suffit de vous inscrire maintenant pour avoir un accès complet à notre bibliothèque