Histoire

novembre 4, 2021

La crise du climat est à nos portes. Le parc de logements du Canada doit en être le reflet

Evergreen

Par Sophie Guilbault, gestionnaire, Création de partenariats, Institut de prévention des sinistres catastrophiques 

Le Défi de l’offre de logement, offert par la Société canadienne d’hypothèques et de logement, invite les participants à proposer des solutions qui réduiront ou qui élimineront les obstacles à l’offre de logements. Evergreen aide les participants du Défi de l’offre de logement en leur offrant des conseils, un mentorat et les ressources nécessaires afin qu’ils puissent préparer et améliorer leur proposition. 

Evergreen demande à des experts du secteur du logement de partout au Canada de partager leurs expériences et de souligner certains des principaux obstacles à l’offre de logements. 

Sophie Guilbault, gestionnaire, Création de partenariats, Institut de prévention des sinistres catastrophiques à Toronto discute de la façon dont le logement doit s’adapter de manière à tenir compte des phénomènes météorologiques extrêmes. 

Le coût élevé des changements climatiques 

En 2020, le Bureau d’assurance du Canada déclarait avoir versé 2,4 milliards de dollars en dommages à des assurés, ce qui représente la quatrième année la plus dispendieuse de son histoire. Les phénomènes météorologiques extrêmes ont dévasté de vastes étendues de notre pays, depuis les inondations à Fort McMurray jusqu’aux pluies violentes en Colombie-Britannique, en passant par les vents destructeurs en Ontario. Au cours des derniers mois, on a également recensé des pertes considérables lors d’événements, comme la tornade qui a frappé Barrie et la région (pertes assurées totalisant 100 millions de dollars) et les feux de forêt en Colombie-Britannique (77 millions de dollars en pertes assurées). Au-delà de l’impact économique associé à la reconstruction, ces événements peuvent avoir des répercussions profondes sur les entreprises locales et les infrastructures publiques. 

Huit des 10 années où les pertes ont été les plus élevées sont survenues au cours de la dernière décennie et on s’attend à ce que la situation empire en raison des conditions climatiques à venir.  Tous les résidents du Canada, et non seulement ceux qui habitent dans les zones touchées, en paient le prix en contribuant au Programme d’aide aux sinistrés.  

Alors que le Canada s’attaque à la crise qui concerne l’offre de logements, il est important de réfléchir non seulement à la façon d’étendre le parc de logements, mais également à la façon de le concevoir et de le bâtir afin qu’il puisse ainsi mieux résister aux phénomènes météorologiques extrêmes. Nous pouvons accroître la résilience au climat de manière plus générale pour les communautés canadiennes en aménageant le territoire de manière réfléchie et en construisant des logements solides. Les villes auront un rôle déterminant à jouer pour y parvenir, mais un effort concerté de la part de différents intervenants, comme les chercheurs et les universitaires, les propriétaires de maison, les promoteurs, les constructeurs, ainsi que tous les paliers de gouvernement, sera nécessaire pour favoriser l’adaptation de manière globale dans tous les secteurs et pour assurer des résultats durables. Des communautés résilientes, des codes du bâtiment efficaces et des individus bien renseignés représentent ultimement la meilleure façon de prévenir les pertes excessives qui sont attribuables aux catastrophes naturelles. 

Collaborer avec les villes  

L’Institut de prévention des sinistres catastrophiques (IPSC) est un centre multidisciplinaire de niveau mondial de recherche et de communication dans le domaine de la prévention des catastrophes. Nous développons des connaissances scientifiques et nous encourageons la mise en place de solutions pour assurer la résilience des Canadiens et de leurs demeures face aux pertes attribuables aux catastrophes naturelles. Par nos recherches, nous identifions et appuyons des gestes soutenus de la part de communautés, de propriétaires de maison, d’entreprises, de gouvernements et d’autres qui augmentent la capacité de la société de prévoir et d’atténuer les catastrophes naturelles, de s’y adapter, d’y résister et de s’en remettre. 

En tant que gestionnaire de la création de partenariats, je collabore avec différents intervenants dans le domaine de l’adaptation pour faire connaître des initiatives dans le domaine de l’adaptation qui reposent sur des partenariats visant à favoriser la résilience à l’échelle locale. J’ai eu la possibilité de démontrer le leadership dont plusieurs communautés ont fait preuve en s’adaptant à des phénomènes météorologiques extrêmes, comme des pluies abondantes, des vagues de chaleur et de graves incendies de forêt. Nos rapports ont démontré que les communautés canadiennes s’adaptent aux différents risques par des moyens innovateurs en faisant appel à des stratégies, comme des règlements locaux, des outils de planification de l’aménagement du territoire et des programmes d’incitatifs. Les gouvernements locaux ont démontré à maintes occasions la façon dont la collaboration étroite avec différents intervenants peut mener à la planification et à la mise en œuvre réussies des mesures d’adaptation au sein de leurs communautés.  

Au-delà des efforts déployés à l’échelle locale, il est crucial d’assurer que les codes du bâtiment des provinces et du Canada comportent des dispositions dans le but d’accroître le rendement des maisons canadiennes lorsqu’elles se retrouvent confrontées à des phénomènes météorologiques extrêmes. Les codes du bâtiment existent depuis longtemps afin de prémunir les gens contre les décès ou les blessures – il suffit de penser aux portes coupe-feu obligatoires dans les immeubles commerciaux qui ralentiraient la progression d’un incendie.  Des recherches considérables ont été réalisées pour identifier certains endroits particuliers où des changements minimes dans les pratiques de construction pourraient améliorer grandement le rendement du bâtiment. Alors que plusieurs changements ont été adoptés et sont sous étude dans les codes de toutes les provinces du pays, les changements au niveau du code du bâtiment demandent beaucoup de temps, de sorte qu’on peut parfois les voir comme étant fastidieux, mais ils demeurent quand même un aspect important du processus.  

Collaborer avec les gens 

Alors que les changements dans les codes du bâtiment peuvent permettre de bâtir des maisons plus résistantes, la majeure partie des logements au Canada se compose de maisons existantes. Alors qu’il est impossible de rebâtir ces maisons pour les rendre conformes aux normes de construction actuelles, il existe encore des gens capables d’adapter et de moderniser leurs maisons. La bibliothèque de l’IPSC aux propriétaires de maison distribue des fascicules, dans lesquels elle décrit les pratiques exemplaires qu’il est possible d’employer pour mieux protéger nos logements contre les catastrophes naturelles.  La série de rapports Les villes s’adaptent met également en vedette différentes stratégies que les villes de partout au Canada ont utilisées de manière efficace afin de procéder à ces changements tout en collaborant avec succès avec la population locale.  

À Québec, par exemple, on a lancé en 2005 un programme visant à rejoindre les maisons privées dans un quartier qui présentait un risque élevé d’inondation. Le quartier s’était développé principalement au début du dernier siècle, alors que plusieurs maisons étaient munies de gouttières reliées au drain des fondations. Ainsi, la majeure partie de l’eau entrait dans le système d’égout combiné, qui débordait lors des tempêtes, entraînant ainsi une inondation destructrice.  La ville de Québec a fait parvenir des lettres à ces foyers pour leur offrir de couvrir les coûts de débranchement du tuyau de descente. À peine un quart des propriétaires de maison ont accepté de participer. Ce n’est qu’après une campagne de sensibilisation publique persistante, qui a demandé sept lettres et deux brochures, qu’on a pu atteindre une conformité totale (100 %) Des programmes comparables de débranchement des tuyaux de descente ont été mis en place à Toronto. 

Le logement et l’impact sur la santé 

La chaleur extrême représente un type de menace autre que les risques climatiques, puisqu’elle touche les habitants d’un immeuble plutôt que l’immeuble en tant que tel. Les cas de chaleur extrême peuvent avoir des répercussions profondes sur la santé des occupants de l’immeuble, en particulier les jeunes enfants, les personnes âgées et les gens aux prises avec un problème de santé préexistant.  

Il existe plusieurs façons de bâtir des logements meilleurs alors que nos étés deviennent de plus en plus chauds. Cela concerne la façon de concevoir l’édifice et son enveloppe, ainsi que son environnement immédiat. Par exemple, si vous avez une fenêtre orientée vers le sud-est qui se trouve très exposée au soleil, vous pouvez planter un arbre à proximité qui permettra à la lumière du jour d’entrer en hiver, mais qui absorbera une partie de la chaleur les jours chauds d’été. Certaines de ces solutions peuvent passer par une liste de vérification de différents éléments – la maison est-elle bien ventilée, les fenêtres s’ouvrent-elles, y a-t-il une source d’ombrage à proximité – mais dans bien des cas, il suffit de penser à la façon de bâtir nos communautés dans l’ensemble. Quelle étendue de la surface environnante est constituée de surfaces pavées foncées, plutôt que d’arbres et de verdure? Quelle sera l’influence d’étendues d’eau ou d’un corridor de vent sur le plan du confort thermique interne d’un immeuble? Lorsque vient le temps de construire de nouveaux logements, il existe certaines choses dont on devrait tenir compte pour que ces habitations soient plus sécuritaires, plus résilientes, plus durables et plus solides. 

Une offre de logements suffisante à l’intention des Canadiens présente assurément une importance extrême, mais il est également important de réfléchir à la façon dont on devrait construire ces immeubles.  La situation n’ira pas en s’améliorant si on continue de laisser nos logements dépérir avec le temps en raison des phénomènes météorologiques extrêmes. Si nous prévoyons investir au sein de nos communautés, il est important de le faire de manière à accroître le nombre de logements durables. Lorsque nous construisons un logement correctement en tenant vraiment compte des conditions climatiques de l’avenir, nous pouvons assurément modifier la façon de vivre des gens, les risques auxquels ils sont confrontés, ainsi que la façon dont ils peuvent résister aux différents risques qui sont attribuables au climat.  

Tel qu’on l’a raconté à Evergreen.

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