Histoire

octobre 4, 2021

Le rôle essentiel du logement supervisé lorsqu’il s’agit d’établir l’offre de logements au Canada

A cut out of a house with sun shining through

Jocelyn Greene, BTS, MTS, CM, est l’ancienne directrice administrative de Stella’s Circle

Écrit par Jocelyn Greene, ancien directeur administratif de Stella Burry Community Services (maintenant Stella’s Circle).

Le Défi de l’offre de logement offert par la Société canadienne d’hypothèques et de logement invite les candidats à proposer des solutions dans le but de réduire ou d’éliminer les obstacles à la nouvelle offre de logements. Evergreen aide les candidats en mettant à leur disposition les directives, le mentorat et les ressources dont ils ont besoin pour préparer et améliorer leur soumission.

Evergreen a demandé à des experts dans le secteur du logement de partout au Canada de partager leurs expériences et de souligner certains des principaux obstacles en ce qui concerne l’offre de nouveaux logements.

Jocelyn Greene, ancien directeur administratif de Stella Burry Community Services (maintenant Stella’s Circle) à St. John’s, Terre-Neuve, nous fait part de ses expériences de travail couronnées de succès dans le cadre d’un des premiers projets financés par l’Initiative des partenariats communautaires supervisés.

Un logement supervisé ou abordable

Le logement abordable est principalement lié aux finances, qu’on définit principalement fonction du montant que reçoit un individu par rapport à la somme qu’il consacre au logement. On considère qu’un logement est abordable uniquement lorsque les gens y consacrent moins de 30 % de leur revenu. Il s’agit là en soi d’un obstacle énorme au Canada.

Le logement supervisé implique une panoplie de programmes, de services et d’approches de travail avec des individus qui ont besoin d’un soutien additionnel afin de pouvoir vivre de manière autonome et pour faire partie d’une communauté. Plusieurs individus doivent composer avec des défis complexes, de sorte qu’ils ont de la difficulté à vivre par eux-mêmes, ce qui constitue un obstacle additionnel lorsque vient le temps de trouver un logement adéquat.

Une étude de cas à Terre-Neuve

En 1995, on procédait à des coupures drastiques dans le Régime d’assistance publique du Canada, un arrangement de partage des coûts en vertu duquel le gouvernement fédéral allait financer des programmes sociaux admissibles pour les provinces, les territoires et les municipalités. À l’époque, je travaillais à Emmanuel House, une résidence communautaire pour personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale comptant 16 lits et située à St. John’s, Terre-Neuve, affiliée avec l’Église unie du Canada.

En raison de ces coupures, le centre psychiatrique provincial s’est vu forcé de fermer 97 des 127 lits de longue durée. Les gens n’avaient nulle part où aller. Plusieurs des individus qui bénéficiaient auparavant de soins hospitaliers se sont retrouvés en prison, parce qu’ils y trouvaient au moins un lit chaud et trois repas par jour. On a ouvert des abris en guise d’intervention d’urgence, mais ceux-ci débordaient et n’apportaient pas de solution à long terme.

Une nouvelle approche en matière de logement abordable

À la fin de 1999, l’adoption, par le gouvernement du Canada, de l’Initiative de partenariats en action communautaire (IPAC), permettait une nouvelle approche en matière de logement supervisé. Stella Burry Community Services avait été créé pour regrouper Emmanuel House et le Naomi Centre, un refuge pour jeunes femmes itinérantes. Cependant, lorsque les résidents quittaient ces programmes, aucun logement supervisé n’existait.

Avec le financement de l’IPAC, nous avons pu faire l’achat de Carew Lodge, une ancienne maison de chambres à St. John’s. Nous faisions partie des premiers projets subventionnés au pays en vertu de ce programme. L’immeuble était tellement délabré au point où des policiers se rendaient régulièrement sur place, de sorte que nous n’avons jamais vraiment dû combattre le problème du « pas dans ma cour ». Les voisins étaient intéressés à apprendre à connaître les améliorations que nous apportions et les mesures de soutien que nous allions offrir. Nous avons impliqué les membres de la communauté, faisant du porte-à-porte pour les informer au sujet du développement et les inviter à notre grande ouverture, qui allait avoir lieu dans l’école du quartier. La réussite de Carew Lodge allait ensuite contribuer à notre réputation lorsque nous mettions sur pied d’autres projets.

Dès les tout débuts à Carew Lodge, nous avons réalisé qu’il était important que les gens disposent de leur propre espace, même s’il s’agissait d’une simple chambre et de leur propre salle de toilette. Cependant, puisque nous étions également préoccupés par l’isolement des personnes vulnérables, nous avons organisé des soupers communautaires et d’autres activités inclusives. Cela semblait simple, mais il était primordial d’aider les gens à établir des liens véritables pour élaborer un programme de logement supervisé. Nous nous assurions que les gens avaient accès à des services de santé mentale et nous avons pu voir des conseillers professionnels. Cependant, alors que nous développions Carew et d’autres édifices, nous avons tôt fait de constater que les gens devaient travailler ou participer à des activités enrichissantes.

Certains des services ne faisaient qu’aider les gens à naviguer dans le monde, comme l’aide pour remplir les demandes d’inscription à l’école. Nous avons mis sur pied un programme musical qui a donné naissance à l’actuel Chœur de l’inclusion. Nous avons offert aux gens la chance de sentir qu’ils font partie de la communauté.

Évolution

Carew Lodge a commencé par 14 unités; en moins de dix ans, le programme de logement supervisé avait atteint presque 100 unités. Un point tournant dans l’évolution du programme est survenu lorsque le ministère de la Défense nationale a fait le don à Stella’s Circle de sept maisons dans le cadre d’un programme visant à remettre les propriétés excédentaires du fédéral à des groupes chargés de créer des logements abordables. Nous avons ensuite contracté une hypothèque pour acheter d’autres maisons ayant besoin de rénovations et nous les avons améliorées afin de créer davantage de logements supervisés. Nous avons éventuellement démarré un programme de nettoyage, un programme de menuiserie et un café. Les participants aux programmes de nettoyage et de menuiserie travaillaient sur les unités de logement, alors que les stagiaires affectés au café aidaient à préparer les aliments pour les résidents qui habitaient dans les logements.

La création de communautés inclusives représente la pierre angulaire de leur approche, puisqu’on doit traiter « l’inclusion » comme étant plus qu’un mot à la mode. Il ne s’agit pas simplement d’intégrer les participants. Mon expérience m’a appris que les gens sont dotés de capacités formidables, mais qu’ils doivent également sentir que vous leur faites confiance. Ils doivent savoir que vous remettrez en question les obstacles à leur inclusion. Nous avons consacré un temps énorme à la formation du personnel et, à en croire les commentaires que nous avons recueillis auprès des gens auprès desquels nous avons travaillé, ils nous font confiance. Ils sentent que nous sommes là pour eux.

Le logement supervisé et l’écosystème du logement au Canada

Le Canada doit surmonter de nombreux défis en matière de logement et l’abordabilité en est un énorme. La cohabitation en tant que solution possible peut se révéler une approche excitante pour les étudiants, les aînés et bien d’autres, mais ces solutions ne sont pas faites pour tout le monde. Certains individus sont aux prises avec des besoins complexes, incluant des maladies mentales et la toxicomanie, ce qui peut les empêcher de partager un appartement avec quatre autres personnes, mais ils sont également incapables de vivre complètement seuls. Ils ont besoin de plus que simplement l’abordabilité. Vous ne pouvez répondre à ce besoin sans un logement supervisé.

C’est ce qu’on a dit à Evergreen.

Jocelyn Greene, BTS, MTS, CM, est l’ancienne directrice administrative de Stella’s Circle. Sous son leadership, l’organisation s’est mérité une réputation à l’échelle nationale pour ses programmes innovateurs dans le domaine de la santé mentale, ses initiatives primées en matière de logements et ses entreprises sociales. Jocelyn s’est vue décerner de nombreux prix pour son travail, dont l’investiture au sein de l’Ordre du Canada, ainsi qu’un doctorat honorifique de l’Université Memorial.

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